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|H.e.d.o.n.i.h.i.l.i.s.m.e|
18 mai 2007

|C.h.e.r.J.u.l.e.s|


Cher, très cher Jules,

  Chaque fois que j'écris cette phrase, je me dis que l'homme doit être terriblement attaché à l'argent, pour faire d'un tel adjectif une formule de politesse.
J'y pensais depuis longtemps, à t'écrire. Je n'imaginais pas que tu allais la lire un jour, qui passe encore par ici... ? En réalité, je n'attends même pas qu'on me lise. Tu sais mieux que quiconque la valeur de l'écriture, pour moi, et pour ma santé mentale. Ce n'est qu'un moyen comme un autre de gerber ma haine, en y mettant la forme.
  Ce n'est pas très réglo de ma part, de t'écrire une lettre en tapant mes phrases sur un clavier sale. Rien n'est plus impersonnel. Mais ça me permet de la garder, et d'avoir ta réponse plus rapidement. Quoi que je ne sais pas si je désire réellement une réponse. J'aurais trop l'impression de te forcer. Et tu es des rares personnes que je déteste brusquer. Je crois que si entre nous, tout est si honnête, c'est parce que rien n'a jamais été forcé.
  D'ordinaire, j'oblige les gens à faire semblant de ressentir de la compassion. Je dirige les réactions selon mes attentes, et je suis terriblement frustrée dès lors qu'on désamorce mes plans. Voir mes propres manipulations enrayées par un importun ambitieux, voilà qui me fout en rogne. C'est mon côté Lysander Lewis.
  Cela dit, en ne plaçant aucun espoir, en ne contaminant pas notre début de relation par mes calculs intéressés, je n'ai pas eu le temps de tricher. Je ne me suis pas sentie coincée, comme un gosse qu'on chope en train de voler des bonbons, mais c'était exactement ce qui se passait. Tu n'as pas emprunté le chemin ordinaire, pour toucher ma sensibilité. Du coup, je n'avais aucune défense immunitaire pour me protéger de ton intrusion inopinée. Tu as saisi mon cerveau à pleines mains, et tu l'as retourné sans ménagement.
  Ce qui m'a fait du bien, c'est de sentir que quelqu'un, enfin, ne se prenait ni pour un psy, ni pour un moraliste, ni pour un modèle de vertu. N'ai-je jamais été bien entourée, ou les hommes sont-ils tous les mêmes, je n'en sais rien. Après tout, moi aussi, je suis unique, comme tout le monde.

  Parfois je me demande si je ne suis pas haïssable, même avec toi. Je ne parle que de moi, encore et encore, je me plains sans m'arrêter, je raconte les moindres détails ce que personne ne voudrait entendre, je pleure et je ris coup sur coup, et je satisfais encore une fois les besoins vitaux qui conditionnent l'existence de mon ego.
  Mais est-ce ainsi ? Je suis incapable d'affirmer que je t'apporte quelque chose, au moins le quart de ce que tu m'apportes. Haha. C'est flou, et niais à souhait, ce genre de phrases. Mais bon sang, quel sens profond celle-ci possède pour moi...
  Si je devais me justifier, je t'expliquerais comment je me fous de l'avis des autres, même des personnes les plus proches qui soient. Je t'expliquerais comment ma fierté rejette d'une manière stricte et radicale tout conseil et tout jugement porté par les autres à mon propos. Peut-être qu'inconsciemment, tout cela influe sur mes décisions, mais en apparence, cela n'a aucune importance. Alors quoi ? Est-ce que tu me rends influencable ? Je n'arrive pas à mettre le doigt sur ce quelque chose qui me lie si intensément à toi. C'est terriblement agaçant.

  En fin de compte, il semblerait que je ne suis pas prête de donner une idée précise et construite de ce que j'aimerais exprimer. J'ai dû finir par me noyer, emportée par une vague de sentiments confus. Et chacun de mes mots à l'air déformé par une connotation populaire qui rend mon propos bien trop flou, et bien trop ambigu. Je refuse d'employer ces termes souillés qui ont perdu toute leur force, "amitié", "estime", "confiance", "complicité", cela ne veut plus rien dire. Parce que ce ne sont pas des choses que l'on dit, mais que l'on vit. On ne peut se permettre de les exprimer à haute voix sans les salir, avec nos phrases boueuses.   
  Tu trouves pas ça contraignant, de devoir enfermer en quelques lettres des émotions aussi riches ?

  Je le vois venir de loin, le mélodrame, ça y est, Aurélie repart dans ses déclarations enflammées, à grands renforts de mots qui cognent. J'aurais pu trouver tout cela ridicule et pathétique. Mais je le prends plutôt au sérieux. Parce que c'est profondément important pour moi.

  Je ne sais plus où je voulais en venir, en commençant à écrire cette lettre. Je ne pense pas l'avoir déjà su. Je n'avais sans doute pas pour but de parler de choses futiles, de ponctuer mes phrases avec des "XD". Manquait plus que je dise des conneries, j'aurais eu l'air crédible, tiens.

  Et puis après tout, j'en ai rien à foutre. Comme si j'avais des choses à cacher, à toi. Je vois pas de quoi je pourrais encore avoir honte. Inutile d'imaginer ce que ça aurait pu être, si tu avais habité la même rue que moi, si je n'avais pas aimé écrire du yaoi et vivre par procuration. Les faits sont là. Ils ne changeront jamais. Peut-être que nous non plus, Jules. Peut-être qu'on restera des masochistes invétérés, que tu continueras à fuir, que je continuerai à m'enfoncer.
  C'est juste l'histoire de deux dingues, que la vie essaye de rattraper, et qui ont oublié de faire un double noeud à leurs lacets. Ils ont beau se casser la gueule, il continuent de courir, sans même essayer de mettre un peu d'ordre. L'espoir d'un avenir tout propre, bien rangé ? Je ne suis pas certaine qu'ils se plairaient, ces deux-là, dans une vie trop ordonnée. L'avantage : pouvoir s'abreuver de la présence de l'autre pour trouver la force de courir encore.
  Quelle prétention, de parler en nos deux noms. Je devrais parler à la première personne du singulier, je sais tellement bien le faire. Je déteste qu'on analyse mon existence avec un air condescendant et philosophe et je me permets presque de le faire. Je vais m'atteler à mon auto-compréhension, avant toute chose.

  Je suis maladroite, chou, tu sais. Et je serais profondément déçue de moi-même si je te décevais, toi. J'ai trop d'affection pour toi pour laisser mes divagations nous gâcher, parce qu'une telle relation de gosses qui se savent adultes, ça arrive dans ma vie comme un bienfait sans limites. Et j'm'en tape, si j'ai l'air égoiste. J'ai pas besoin d'écrire des tonnes, pour que tu voies où je veux en venir, n'est ce pas ?

            
   
            On n'en a jamais eu besoin.


Je t'aime fort,
Gni~

Ta Cerise -



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Commentaires
J
Tu as déjà eu ma réponse, mais ...<br /> J'taime fort ma Cerise <3
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