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|H.e.d.o.n.i.h.i.l.i.s.m.e|
15 mai 2008

|L.a.c.u.n.a.i.r.e|

Fucking island [1/2]

Dream_and_Nightmare_by_suetlilanglz

[Dream and Nightmare by suetlilanglz]


Les trous qu’avaient foré les lames dans le corps étaient mous et flasques, longues fentes vides. Ils ressemblaient à des lignes, tracées en rouge sombre sur une peau de tissu.

Agenouillée dans l’unique coin d’ombre de la pièce, tout près de la fenêtre, elle réprimait la nausée, ce besoin impérieux d’écarter les trous des deux mains, de les supplier de saigner, de gicler sur les murs, d’éclabousser ses vêtements bleu ciel et son visage corrompu.
Après avoir planté les ciseaux dans le ventre nu de la femme, elle avait hésité, penchée sur le corps secoué de convulsions. Parce que dans la confusion, elle n’avait pas su différencier la droite et la gauche. Dans la confusion, elle s’était demandé où se trouvait le cœur, avant même de se demander si la femme en possédait un.

Elle sentait l'incohérence. Un terrible anachronisme. « On m’a menti », pensait-elle, et ces mots pirouettaient au fond de son être, diffusant insidieusement leur pouvoir de persuasion. Ces mots-là n’avaient pas plus de valeur qu’un amas de lettres, ils n’évoquaient aucune image, ne signifiaient rien de concret ; ils flottaient, entêtaient. Leur ombre était incroyablement vaste, infinie comme un univers d’étoiles et de poussière, elle se mouvait avec fluidité, formes fluctuantes. C’est l’ombre des mots qui tassait ses épaules.

Elle se savait poursuivie. Cauchemar kafkaïen, impossible de deviner un visage, un mobile. On voulait sa peau, quelqu’un voulait l’éplucher comme un fruit et dévorer sa chair, laper goulûment son jus. Coupable d’un crime inconnu, elle courait.
La voilà à présent dans cette chambre vide, tordue par les recoins. Il n’y a qu’une porte, elle sait qu’elle devra tuer tous ceux qui voudront la franchir ; pour ne pas mourir, elle. Elle visualise parfaitement les escaliers, son regard imaginaire s’est coincé dans l’angle d’une caméra de sécurité. Elle entend les craquements du bois vieilli, elle sent que celui qui monte se retient de rire, il sait qu’elle le voit, il sait que le bruit des marches lui parvient.

Le cadavre se tient toujours là, le ventre fendu, tendu vers le plafond. Elle prend de nouveau conscience de sa présence. Un éclair traverse sa rétine, un instant, elle croit voir un masque de porc luisant et rose posé sur le visage de la morte. Elle cligne des yeux, puis se souvient. Quelques minutes plus tôt, il y avait d’autres êtres vivants. Ils ne comprenaient pas, ils devenaient fous au simple contact de sa détresse, ils tombaient, raides, tétanisés, froids, déjà. La chose qui vivait en elle ne laissait pas le choix. Ni le temps.

Elle avait grimpé, elle aussi, ouvert toutes les portes. Elle avait inspecté les placards les plus minuscules, espérant pouvoir s’y dissimuler. Elle y entrait un pied, puis renonçait et ouvrait une autre porte. Tant de pièces ! se disait-elle, je vais sans doute trouver une cachette, je n’en bougerais plus, et puis ça s’arrangera, oui. Il n’y avait que cela, des portes, et des pièces vides. Parfois, elle devait se plaquer contre un mur, et y enfoncer ses ongles. Retenir son souffle, court, les paupières, serrées.

Elle a envie de vomir. Les ciseaux couleur rouille. Elle tire sur sa jupe bleu ciel, et rapproche encore ses mollets de ses cuisses.
L’ombre a rétréci.  

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Commentaires
O
Salut j'ai découvert ton blog il y a une ou deux semaine mais je n'avais jamais vraiment pris le temps de le lire,c'est chose faite aujourd'hui et je dois dire que tes texte sont vraiment beaux(aussi beaux que le design du blog),continue comme ça.
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