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|H.e.d.o.n.i.h.i.l.i.s.m.e|
10 octobre 2007

|L.a.c.h.o.s.e.c.o.m.p.l.e.x.e|

Pour la prépa, je dois acheter tellement de livres. Je pourrais les emprunter à la bibliothèque, mais bien entendu, je préfère les avoir dans la mienne.

Scott_Scheidly___Geisha

J’inviterais bien des astronautes à dîner. Je leur dirais tous les cosmos qui se cachent entre les murs de ma chambre, je leur montrerais combien leur attirail est nécessaire, lorsqu’on est confrontés à de tels univers. Néanmoins, il ne faudrait pas qu’alors ils eussent le désir de changer de métier. Il y a ces pauvres hommes ennuyés qui se battent avec les morts dans l’espoir de les faire parler : ils y perdent leur propre vie.

Quand Gide dit « J’écris pour être relu », il sait sans doute que cette déclaration ne fait pas loi, et qu’une fois abandonnée au public, l’œuvre n’appartient qu’à lui. Si je veux refermer L’immoraliste au bout de deux pages (ce que j’ai fait à l’instant), Gide ne pourra pas me forcer à le terminer, et encore moins à le lire à nouveau. Il ne pourra pas non plus m’empêcher de déchirer l’incipit, d’écrire des idioties dans la marge, de commencer par la fin, de la raconter à tout le monde, de mal saisir. Personne n’était censé rire devant La cantatrice chauve ; personne n’aurait dû applaudir à la fin d'En attendant Godot. Mais mes chers, très chers, dramaturges fous, en tentant de vous faire comprendre de la sorte, vous n’avez fait qu’éparpiller le troupeau.

Pire : certains autres, dans leur infinie bonté, ont décidé d’éclairer les lanternes des pauvres ignorants. Ceux-là « expliquent », « traduisent » en langage populaire ce qui existait à l’état pur dans le langage poétique. Sur un livre trois fois plus volumineux que la Bovary, on parvient à réduire, à cloisonner les richesses infinies, inépuisables des mots flaubertiens. On crée des lieux communs, des symboles, des mythes. Quelque chose d’aussi fin que blanc = pureté et rouge = passion.

J’ai déjà été confrontée à ce genre de situations. La justification de l’usage d’un mot, d’une tournure, d’une rime, comme si c’était mathématique. C’était une erreur. D’abord parce que cela condamne la polysémie. Ensuite parce que c’est transgresser les règles du jeu. Si le lecteur doit s’empêcher d’enfermer les images d’un mot dans un terme scientifique, l’auteur n’a pas à le faire à sa place. On admire (vénère !) très bien le talent d’écrivains qui refusaient jusqu’à la paternité de leur propre création. Il n'y a rien à justifier. C'est ainsi, alors "es muss sein !".

Tout ça simplement parce que je remarque combien on peut salir des textes sublimes en passant des heures à les décortiquer. Démanteler leur mystère revient à éventrer l’auteur. Expliciter les secrets qui dialoguent avec notre âme en cachette revient à trahir les jolis créateurs. Parler au nom des génies revient à dénaturer la littérature.



C’était mon horrible moment théorique un peu douteux.
Je vous épargne mes considérations sur le proverbe « L’homme pense, Dieu rit ».

 

« Pour aborder des questions infiniment moins barbantes » [c’était juste pour essayer de parler comme Mme A. – je le ferai plus.]… il faudra attendre le prochain article. Pour l’heure, je retourne à ma dissertation, et ses problématiques existentielles.

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Commentaires
I
Je me reconnais là-dedans. Je n'ai jamais pu me définir comme une littéraire, parce que pour moi un livre se vit. Le décortiquer c'est le tuer. C'est si présomptueux de s'imaginer pouvoir connaître la pensée de l'écrivain.<br /> <br /> Et puis.<br /> "Je pourrais les emprunter à la bibliothèque, mais bien entendu, je préfère les avoir dans la mienne."<br /> *sourire*
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